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FIFF 2017 : M, de Sara Forestier ou la communication des impossibles

Lila (Sara Forestier) est bègue et s’est réfugiée dans le silence, par peur d’être nuée et muselée par un père intransigeant (Jean-Pierre Léaud). Sa vie bascule lorsqu’elle rencontre Mo (Redouanne Harjanne), un jeune homme charismatique, en manque d’adrénaline et d’amour. Ils tombent fou amoureux, mais Lila va découvrir que Mo a aussi ses secret inavouables dans notre société basée sur l’excellence et la compétition.

Dans le chaos des flux de communication et d’information à outrance devenus incontrôlables, Sara Forestier essaie de simplifier le B à Ba de l’échange, en tentant de partir du primordial: du discours et de l’écriture. Avec une histoire qui flirte entre mélodrame et conte de fées urbain, M raconte l’histoire existentielle de Lila, une étudiante obstinée, mais riche en ressources intérieures et au talent littéraire indéniable, qui tombe amoureuse de Mo, un fan et conducteur de courses-poursuites en voiture et pâtissier talentueux à ses heures. Le film fonde sa propre existence sur la fragilité des deux protagonistes pour raconter la force des liens sentimentaux et non verbaux. De fait, si Lila ne peut pas parler, Mo ne peut pas lire et écrire. L’illettrisme vu par la lorgnette d’une rencontre amoureuse entre deux écorchés vifs par le jugement que porte la société sur eux … Quel sujet passionnant et prometteur sur le papier !

— Redouanne Harjanne et Sara Forestier – M
© Chi-Fou-Mi Productions

Là où le bât blesse c’est la mise en forme de cette histoire qui naît par hasard. Les deux protagonistes ont peur de toute communication mais se livrent l’un à l’autre avec passion. Les premiers remerciements de Lila à Mo par le biais de ses poèmes vont changer l’attitude de Mo à son égard entre rejet, désintérêt apparent et violence contenue. Il était si inadéquat puisqu’il n’a pas été à l’école, un état qu’il vit comme un coupable. Lila pourra recomposer des liens brisés à force de persévérance et de patience.

M est un film qui réussit à reconstituer les hiérarchies relationnelles intermédiaires. malheureusement, le film souffre de maladresses de mise en scène comme de direction de acteurs; une séquence cocasse dans laquelle Mo est initié à l’alphabet et à l’orthographe par la petite sœur de Lila devient le paradigme de la solitude de l’univers des personnes illettrées, voire analphabètes. Mais la méthode usitée par la fillette, on n’y comprend absolument rien, même en tant que personnes parfaitement scolarisées.

La parole et l’écriture, les sentiments … Tout un programme qui aurait pu être abordé sous l’angle social, de l’égalité d’accès et d’adhésion à la scolarisation. Ici ce qui prime, c’est la rencontre entre Lila et Mo, devenue nécessaire à leur cheminement personnel. Maladroitement, l’actrice devenue réalisatrice, filme en gros plan sa  culotte alors que son compagnon s’apprête à lui faire découvrir le plaisir charnel. Était-ce bien nécessaire d’infliger une telle scène aux spectateurs vu la problématique abordée ?

— Redouanne Harjanne au Festival du Film Français d’Helvétie 2017
© Firouz Pillet

M, présenté àà la 74ème Mostra de Venise et à la 13ème édition du Festival du Film Français d’Helvétie qui a eu lieu du 13 au 17 septembre 2017, est projeté au FIFF 2017. Même visionné plusieurs fois, M laisse un sentiment d’inachevé. Peut-être pas assez profondément explorée, la thématique liée  à la communication se disperse dans des sentiments prépondérants, des réseaux subtils qui rendent ce monde si complexe, si difficile à interpréter tant pour le comédiens que pour les spectateurs.

La jeune cinéaste, révélée dans le rôle de Lydia dans L’ Esquive d’Abdellatif Kechiche, gros succès critique et public qui lui vaut le César du Meilleur espoir féminin en 2005, nous expliquera, lor d’un entretien ce lundi 2 octobre, les arcanes de ce premier long métrage qui suscite moult questions sur sa manière d’aborder un monde marginal, invisible, symptomatique de l’absence de communication.

j:mag a rencontré l’acteur interprétant Mo, Redouanne Harjanne, lors de sa venue en Suisse à l’occasion du Festival du Film Français d’Helvétie, en septembre 2017.

Firouz E. Pillet

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Firouz Pillet

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