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Mostra 2017 : Mektoub, My Love: Chant un, d’Abdellatif Kechiche, se veut un hymne vibrant et passionnant à la vie et à la jeunesse

Quatre ans après le succès de La vie d’Adèle, le réalisateur franco-tunisien Abdellatif Kechiche, très attendu sur les rives du Lido, tant par la presse que par les festivaliers, revient à la Mostra de Venise pour la quatrième fois. Avec Mektoub, My Love :Chant un, premier volet d’une trilogie, il propose une réflexion sur les merveilles de la jeunesse et de l’éveil à la sexualité, souvent débridée.
Suite à la projection de presse, le réalisateur a divisé la presse internationale, à la fois fascinant et semant la polémique avec son film en compétition, dont les acteurs sont majoritairement de jeunes premiers : Shaïn Boumedine, Ophélie Bau, Lou Luttiau, Salim Kechiouche, Hafsia Herzi et Alexis Chardard, tous à la plastique très attrayante ce qui a déclenché beaucoup d’enthousiasme lors du photo-call.

Mektoub, My Love: Chant un
© La Biennale di Venezia

L’écrivain aspirant Amin (Shaïn Boumedine) revient de Paris pour passer les vacances estivales dans son village natal du sud de la France. Dès son arrivée, il découvre que sa confidente Ophélie (Ophélie Bau), est sur le point de se marier avec un ami alors qu’elle entretient des relations secrètes avec Tony, le cousin d’Amin depuis des années. Pour ce dernier, à la recherche d’inspiration pour son scénario, cet été le nourrira d’expériences, de sensations, d’attractions, de nuances auprès de ces belles femmes qui l’entourent et qu’il immortalisera avec son fidèle appareil photographique, capturant les meilleurs moments.

Abdellatif Kechiche était très attendu au Lido et a enchantée une partie de la presse avec cet hymne de trois heures à la vie, la jeunesse mais surtout la chair. Comme le cinéaste a répond à une journaliste anglophone, choquée par le nombreuses et interminables scènes de sexe qui objétisent le corps des femmes alors que le corps des hommes restent, la plupart du temps, vêtu : “Mon film est  aussi une réflexion sur le rapport entre l’attraction la plus pressante et la victime inéluctable du destin, le Mektoub du titre”.

Mektoub, My Love: Chant un
© La Biennale di Venezia

Dans un processus à la fois égal et opposé à La Vie d’Adèle, le cinéaste tunisien place le noyau de la narration dans le corps féminin, représenté sous tous les angles possibles et sans filtre (avis aux amateurs !), mais en peaufinant la photographie et les plans prévenant ainsi les critiques possibles sur le présumé exhibitionnisme ou la désacralisation et objétisation avilissante du corps des femmes. Là où le film avec Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux exposaient, exaltées la passion du sexe, Mektoub, My Love: Chant un (à l’exception de la première scène, très explicite) suggère pus que ne démontre, stimulant le sens des spectateurs (à l’évidence plus la gent masculine) et met en haleine sans donner aux spectateurs et aux personnages la satisfaction de la catharsis de la libération, mais agissant comme un long et contradictoire prologue d’histoires et d’attractions qui ne trouvent jamais une matérialisation.

Ce qui, à un premier regard superficiel, pourrait facilement être marqué comme une création voyeuriste et non aboutie des joies et des contradictions de la jeunesse, se révèle une réflexion bouleversée sur l’âme humaine, décodée ici par Kechiche qui effectue une autopsie des formes du corps féminin. Abdellatif Kechiche fait un travail extraordinaire du point de vue de la mise en scène et de la direction d’acteurs, faisant de chaque expression, de chaque geste et de tout mouvement mineur et involontaire du corps une célébration du désir et de la sexualité non exprimés. Dans un élan insouciant et passionné à travers son regard accrocheur mais respectueux, le cinéaste tunisien emporte les spectateurs dans une histoire intemporelle, faite de doux secrets, d’imprévus, de rebondissements, soutenus par les performances incroyablement naturelles et immersives des jeunes artistes débutants dont Ophélie Bau, qui se démarque et dont nous entendrons encore certainement parler.

Malgré les moments fluides et passionnants de Mektoub, My Love: Chant un s’étale en longueur avec des scènes interminables, quasiment en temps réel, en discothèque avec les tubes des années 90, surtout techno, les comédiens incarnant des personnages inépuisables et à l’exubérance irrationnelle… ces séquences auraient pu être évitées. Kechiche a choisi de photographier un âge avec sa fragilité et ses émotions, caressant au sens propre du terme avec les images le corps féminin comme très peu d’autres cinéastes sont capables de le faire.

La fin ouverte et non concluante se regarde avec un goût amer dans la bouche, mais aussi avec le désir irrépressible de découvrir l’avenir de ces personnages complexes dans les volets suivants de cette trilogie. Bref, Mektoub, My Love: Chant un laisse une impression mitigée et amibigue.

Firouz E. Pillet de la Mostra 2017, Lido

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Firouz Pillet

Journaliste RP / Journalist (basée/based Genève)

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